Écrêtages et invalidations : quels motifs (suite).
Nous avons énumérés dans le précédent article tous les motifs officiels invoqués par la direction pour invalider
ou écrêter le temps de distribution badgé.
Si certains d'entre eux sont légaux car d'ordre public, d'autres imposés par la force paraissent plus que contestables.
Seules 3 mesures sont conformes à l'accord du 4 juillet 2016 :
- Pas de badgeage sur le terrain, encore faut-il qu'il soit involontaire (art.4-2). Pas de régul.
- Dysfonctionnement ou panne de la badgeuse (art.4-2d). Régul possible.
- Le temps mesuré est supérieur du temps théorique de plus de 5 % (art.4-3a).
En règle générale, le temps est payé jusqu'à la limite temps max, ou plus si code.
Mesures d'invalidation hors accord et donc contestables :
- "Action de badgeage réalisée en dehors des limites du secteur". Paiement temps repère.
Il s'agit de début, fin ou pause hors secteur. Pas de régul possible, alors que cet incident est souvent
imputable à une mauvaise lecture des plans parfois flous.
- "Distribution partiellement réalisée" : couverture secteur inférieure à 60 %. Pas de régul.
Le distributeur fait de son mieux, atteint le temps max, sa distribution n'en finit plus, il cherche désespérément
des adresses. Qui ne l'a pas vécu en remplacement sur un nouveau secteur?
Mais si la direction fixe à 60 % ce seuil, n'est-ce pas consciente qu'il correspond au temps repère ?
- "Distribution en dehors du périmètre de distribution" : plus de 500m en distance ou 30 minutes.
Pas de régul. Incident typique zone rurale où le distributeur se perd parfois.
Mais durant ces 30mn, ou sur ces 500m, n'a-t-il pas distribué avec professionnalisme, en son âme et conscience,
où est-il parti acheter le sel à l'épicerie du coin ?
- "Oubli de pause ou d'arrêt en fin de journée" : il m'arrive effectivement, après des heures et des heures sous la pluie,
ou des prises de tête avec les adressés, bref une journée éreintante, de rentrer au plus vite à la maison en oubliant d'arrêter la machine.
Résultat: 19h de distribution, ça fait désordre. Mais enfin, depuis 4 ans que je badge ce secteur, ne connaît-on pas
le temps moyen nécessaire à une distribution identique ?
- "Le même secteur a été badgé plusieurs fois". 3 raisons à cela :
* Le distributeur , par erreur, marque "terminé" au lieu de "pause". Il reprend donc sa distribution avec un nouveau démarrage. Possibilité régul.
* La badgeuse disjoncte. Il faut repartir de zéro, identifiant, mot de passe etc. Possibilité régul.
* Le distributeur inverse les secteurs (déjà vu). De ce fait, double peine : l'un est distribué hors zone, l'autre 2 fois.
Pas de régul.
La moindre erreur, c'est sanction immédiate et souvent irréversible. Si le temps théorique feuille de route, dit repère, était correct, ces invalidations seraient sans trop de conséquences.
Malheureusement, dans 80 % des cas, il est sous-évalué, au détriment absolu du salarié qui se retrouve alors rémunéré temps préquantifié, comme à l'ancien temps.
Incorrigibles patrons !!!
Nous abordons maintenant le fleuron des mesures, le top du top, L'ÉCRÊTAGE.
"L'écrêtage" : un mot à consonance exotique et douloureuse ; le coq de la basse-cour ferait-il "cocorico"
si on lui arrachait son appendice viril de la tête ?
L'écrêtage n'invalide pas le temps badgé. Plus subtil, il rabote, rabote à n'en plus finir.
C'est le kébab version Adrexo. On découpe le temps en fines lamelles, comme la viande, et à la fin, il reste le support pour le distributeur pendant que la monnaie tombe dans l'escarcelle du patron.
Parmi les différents motifs d'écrêtages, deux sont logiques et conformes à la loi.
- dépassement de 10 heures de la journée de travail, le supplément ne sera pas payé.
- Oubli de pause après 6 heures de travail, les 20 minutes obligatoires seront retenues.
Par contre, le principal motif d'écrêtage, L'IMMOBILITÉ, lui, est illégal.
Nous retiendrons l'écrêtage pour immobilité supérieure à 7 minutes en continu.
Entre charger et décharger le chariot en différenciant pubs villas, résidences, HLM, commerces, et parfois stop-pubs, chercher les adresses sur les BAL avec des entrées des résidences non indiquées et trouver le bon pli, se repérer
sur le plan ou inscrire sur les enveloppes le motif de non distribution, et tutti quanti, les secondes défilent tels les bolides aux 24 h du Mans et, conséquence, l'écrêtage est l'apanage du bon distributeur, Et que dire de la prostate malveillante !
Tout autre commentaire serait superflu, encore que...en version corrigée et améliorée, l'écrêtage décapite à en faire pâlir le docteur Guillotin lui-même.
Car cet écrêtage pour immobilité se transforme en invalidité du temps badgé si le cumul d'immobilité dépasse 15 % du temps théorique.
N'en jetons plus, nous atteignons le paroxysme destructeur de cette mesure abusive.
Dès votre prise en main de l'état récapitulatif de distribution que votre manager, et c'est une obligation, doit vous remettre chaque semaine, vérifiez immédiatement la présence d'anomalies, et ne vous fiez surtout pas à la case "écrêtage" qui marque systématiquement 0, afin de ne pas attirer votre attention sur le rabotage. Pas vu, pas payé !
Chez Adrexo il y a le 0 plus et 0+0 = 0, et le 0 moins qui se soustrait : 3h57 moins 0 = 3h05 !!!
Ce sont inlassablement les mêmes mathématiques patronales adaptées à leurs intérêts. Du travail en perspective pour l'avocat de FO !